Guinée : bras de fer entre l’État et la société minière GAC

Depuis près d’un mois, la société minière Guinea Alumina Corporation (GAC) fait face à une suspension de ses exportations de bauxite, décidée par l’État guinéen. Cette mesure marque une escalade dans les tensions entre les deux parties, avec des implications majeures pour le secteur minier national.

Le ministère des Mines, par cette décision, espérait forcer la société à engager des discussions pour un nouvel accord. Cependant, cette tentative semble rester lettre morte. Les responsables locaux de GAC ne disposeraient pas du pouvoir de négociation nécessaire pour interagir avec le Comité stratégique, dirigé par Djiba Diakité, Directeur de cabinet à la Présidence.

La raffinerie au cœur du différend

La principale source de tension est la non-construction d’une raffinerie d’alumine en Guinée. Inscrite dans la convention signée en 2014 sous le régime d’Alpha Condé, cette obligation devait se concrétiser une fois le seuil de production de 10 millions de tonnes de bauxite dépassé. Aujourd’hui, avec une exportation annuelle de près de 15 millions de tonnes, GAC ne respecte toujours pas cette clause.

Le gouvernement accuse la société de mauvaise foi, d’autant que la transformation locale de la bauxite permettrait de stimuler l’économie guinéenne. Actuellement, GAC exporte le minerai brut vers les Émirats arabes unis pour y être raffiné à al-Taweelah. Un expert du secteur, cité par RFI, affirme que « les autorités guinéennes mettent la pression sur les Émiriens », reprochant à la maison-mère EGA de « traîner les pieds » sur cette obligation.

Des enjeux économiques et sociaux cruciaux

La Guinée détient les plus importantes réserves mondiales de bauxite, estimées à 7,4 milliards de tonnes. Pour le gouvernement militaire, transformer cette richesse en levier de développement est une priorité. Cependant, la suspension des activités de GAC n’est pas sans risques.

La mine de Boké, qui emploie environ 3 000 personnes, est essentielle à l’économie locale. Un arrêt prolongé pourrait entraîner un plan social d’envergure. Comme le souligne une source interrogée par RFI, « tout le monde a intérêt à un règlement du différend. Le gouvernement ne peut pas se permettre un plan social, et l’entreprise minière, elle, doit continuer de produire ».

Un futur incertain pour GAC

Des indiscrétions rapportées par des sources locales suggèrent que les autorités pourraient aller jusqu’à retirer le permis d’exploitation de GAC, qui arrive à expiration en 2027. Une telle décision, bien que conforme à la volonté du gouvernement de défendre ses intérêts, risquerait de ternir l’image de la Guinée auprès des investisseurs étrangers.

De leur côté, GAC et sa maison-mère EGA dénoncent des « violations des obligations contractuelles » de la Guinée, qualifiées d’« injustifiées ». Cette position laisse entendre que le conflit pourrait s’éterniser, à moins d’une médiation rapide.

Quelles leçons pour le futur ?

Au-delà de ce différend spécifique, cette crise illustre les défis auxquels la Guinée est confrontée pour tirer le meilleur parti de ses ressources naturelles. Alors que le pays reste l’un des principaux fournisseurs de bauxite au monde, sa capacité à transformer cette richesse en bénéfices locaux durables est plus que jamais en question.

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